Auteur : Lluis Quintana-Murci

Editions Odile Jacob

www.odilejacob.fr

Octobre 2021

336 pages

Tarif indicatif de 23,90 €

 

Qui sommes-nous, êtres humains ? C’est la question à laquelle tente de répondre Lluis Quintana-Murci, biologiste franco-espagnol de renommée mondiale, chercheur de l’Institut Pasteur, professeur au Collège de France où il occupe la chaire de génomique humaine et évolution. L’auteur nous explique en mots simples les extraordinaires progrès de la génomique au cours des récentes décennies, qui nous permettent de mieux comprendre nos origines et notre destinée. Le genre Homo apparaît parmi les primates, il y a plus de deux millions d’années. Il s’est rapidement diversifié en de nombreuses espèces, d’où va émerger il y a environ 300 000 ans, notre espèce, Homo sapiens, forgée par la sélection naturelle. Notre ancêtre direct est un singe bien singulier, apparu en Afrique, avec son langage et son cerveau trop gros. Quittant son berceau africain voilà de ça 60 000 ans, il s’est dispersé dans le monde entier. Pendant des millénaires, il a progressivement peuplé l’ensemble de la planète, depuis l’Arctique jusqu’aux plus hautes montagnes et aux îles les plus inaccessibles.

Pour suivre sa trace, nous disposons des études de l’ADN des populations humaines contemporaines, mais aussi de l’ADN ancien provenant d’ossements ou de momies. C’est grâce au développement de l’archéobiologie qui constitue une véritable révolution technologique permettant de décrypter le génome d’espèces disparues depuis des dizaines de milliers d’années. À peine dix ans après la publication du génome complet de Homo sapiens, on a déchiffré les génomes de l’homme de Neandertal (Homo neanderthalensis) et de Homo denisova, une espèce totalement inconnue et identifiée à partir d’une dent ! Ainsi, notre espèce est le fruit d’un métissage entre ces trois espèces. Chacun de nous conserve dans son génome quelques pourcents des gènes de nos lointains cousins.

L’auteur narre la longue histoire du métissage des populations humaines, qui va faciliter notre capacité d’adaptation à des environnements très divers et souvent hostiles : par exemple, la digestion du lait, la pigmentation de la peau selon l’ensoleillement, l’accoutumance au froid et les oméga-3, à la forêt tropicale où vivent les pygmées, à l’altitude et à l’hypoxie… Conjointement, Homo sapiens doit s’adapter aux agressions microbiennes diverses, amplifiées lors de sa sédentarisation au néolithique il y a environ 10 000 ans. C’est alors qu’au contact des animaux d’élevage, notamment, émergent beaucoup de maladies infectieuses, parfois épidémiques, favorisées par l’expansion démographique et la promiscuité dans les premières cités. 

À la lumière de la génétique des populations et de l’analyse du polymorphisme génétique des individus, l’auteur retrace toute l’histoire des populations de l’Afrique, de l’Europe et des « Asies », ainsi que la colonisation de l’Amérique il y a 13 000 ans. Lui et son équipe de l’Institut Pasteur ont beaucoup contribué à ces découvertes. L’archéobiologie a aussi permis d’identifier, à partir de restes humains, de nombreux agents pathogènes, virus, bactéries ou parasites. En reconstituant les arbres généalogiques des microorganismes, on peut estimer la date de leur apparition. L’auteur insiste également sur les avantages du métissage et les bienfaits de la diversité pour la survie de l’espèce humaine. Il illustre son propos par une citation du biologiste évolutionniste Theodosius Dobzhansky : « Rien n’a de sens en biologie si ce n’est à la lumière de l’Évolution ». Il rappelle de même ce que nous devons à l’héritage génétique des humains archaïques, notamment dans la résistance aux infections. 

Une des grandes qualités de l’ouvrage Le peuple des humains est la simplicité et la clarté du récit, facile à lire et accessible au grand public. Il repose aussi sur une bibliographie impressionnante étayant chaque chapitre de l’ouvrage. C’est un hymne à la diversité et au métissage, basé sur des données scientifiques solides. 

PB