Coordinateurs : Françoise Salvadori
et Laurent-Henri Vignaud
Éditions Vendémiaire
site web : www.editionsvendemiaire.com
Janvier 2019
360 pages
Tarif indicatif de 23,00 €
Cet ouvrage de 360 pages est tout à fait passionnant. Il permet de mieux comprendre les raisons profondes de l’opposition aux vaccinations que l’on voit émerger dans le monde. Les auteurs sont maîtres de conférences à l’université de Bourgogne, l’un est historien des sciences, Laurent-Henri Vignaud, l’autre est virologue, Françoise Salvadori. Ils font une analyse approfondie et très documentée de la réticence, voire de l’hostilité aux vaccinations dans certains pays occidentaux, mais aussi du tiers-monde. Par exemple en France, 40 % des Français considéreraient les vaccins comme non sûrs, et certains sont farouchement opposés à toute vaccination pour leurs enfants. Dans d’autres pays comme l’Afghanistan et le Pakistan, les médecins vaccinateurs sont attaqués, voire assassinés. Pourquoi ? Les vaccinations n’ont-elles pas contribué à faire disparaître en grande partie les maladies infectieuses qui décimaient les très jeunes enfants depuis des siècles, comme la variole, la rougeole, la poliomyélite, le tétanos, la diphtérie ou encore la tuberculose ? En synergie avec l’amélioration des conditions sanitaires et l’usage des antibiotiques, n’ont-elles pas entraîné l’effondrement de la mortalité infantile et par voie de conséquence contribué à l’allongement de l’espérance de vie qui est passée d’environ 30-35 ans à la fin du XVIIIe siècle à près de 80 ans aujourd’hui ?
Cette régression sans précédent des maladies infectieuses donne à la population une impression de fausse sécurité. En réalité, on sait combien cela est fragile. Prenons la rougeole, une maladie qui avait quasiment disparu dans les pays occidentaux dans les années 1970. Un certain Dr Wakefield a prétendu sur des résultats truqués que la vaccination contre la rougeole pouvait favoriser l’autisme. Cela a contribué à une défiance de la population pour cette vaccination et à l’éclosion de multiples épidémies dans les pays occidentaux comme l’Angleterre, la France et les États-Unis, avec un certain nombre de décès évitables. Il faudra encore des années pour convaincre de la fausseté de ces allégations qui ont été balayées par de nombreux travaux scientifiques. De la même façon, on voit régulièrement réapparaître dans certains pays des maladies comme la coqueluche ou la diphtérie, autrefois disparues. Les fake news, relayées par les réseaux sociaux ont la vie plus dure que les vérités scientifiques.
Cet ouvrage est en réalité une enquête très bien faite sur trois siècles d’opposition à une révolution médicale. Les auteurs y dévoilent les causes profondes de l’hostilité aux vaccinations. Loin d’être un phénomène nouveau, cette contestation apparaît dès le XVIIIe siècle lors des premières tentatives pour prévenir la variole, une maladie redoutable qui entraîne 25 à 45 % de mortalité. Aujourd’hui, ce fléau qui entraînait en Europe des dizaines de milliers de morts chaque année, a disparu de la surface du globe en 1977, après une campagne de vaccination mondiale orchestrée par l’OMS. La vaccination a connu de farouches oppositions religieuses, car pour les intégristes de certaines religions, elle va à l’encontre de la Providence. Par la suite, d’autres arguments ont été avancés, pseudo-écologiques, complotistes mettant en cause les Big Pharma ou même l’État-complice, des poncifs comme la vaccination qui s’opposerait à « la nature qui fait bien les choses »… C’est oublier la terrible mortalité infantile « naturelle » due aux maladies infectieuses observée encore aujourd’hui dans beaucoup de pays du tiers-monde. Les antivax n’épargnent personne, même pas Pasteur et sa théorie des germes, ni même la vaccination contre la rage qui prévient une mort inéluctable.
On ne peut que recommander la lecture de ce livre très instructif.
P. B.