par Frédéric Morinet *

 

Depuis l’avènement des trithérapies, l’infection par le VIH est devenue chronique ; néanmoins, elle reste sujette à des complications : il en est ainsi de la néphropathie associée à l’infection virale. Depuis 2010, une étude française multicentrique a établi que la transplantation rénale n’était pas contre-indiquée chez des patients receveurs infectés par le virus (1). Effectivement, la survie de ces greffés était de 100 % à un an et de 98 % à deux ans, similaire à celle observée chez des transplantés rénaux exempts d’infection.

Cependant, dans certains pays comme l’Afrique du Sud, une véritable explosion de l’infection par le VIH est constatée dans la population, soulevant le problème de la transplantation rénale à partir de greffons provenant de sujets « VIH positifs » pour des receveurs également « VIH positifs ». C’est ce que rapporte l’article d’Elmi Muller et coll. (2). Il s’agit d’une étude prospective non randomisée, effectuée entre 2008 et 2014 chez 27 receveurs « VIH positifs » dont le nombre de lymphocytes T CD4+ était égal ou supérieur à 200 par mm3 de sang et la charge virale plasmatique indétectable ; les greffons étaient issus de donneurs « VIH positifs » en état de mort cérébrale, n’ayant pas reçu de trithérapie et dont la charge virale était indétectable. Les greffés ont été suivis pendant deux ans et demi. Leur survie était de 84 % à un an et trois ans, et de 74 % à 5 ans, et celle des greffons, aux mêmes périodes, était de 93 %, 84 % et 84 %. Le taux de rejet du transplant était de 8 % à un an et de 22 % à 3 ans. Malgré l’administration d’immunosuppresseurs, l’infection virale était bien contrôlée sous traitement antirétroviral.

Une telle stratégie ouvre des perspectives, comme la transplantation du rein d’un donneur infecté par le cytomégalovirus (CMV) à un receveur « CMV » séropositif ou séronégatif, car une prophylaxie antivirale est possible ; il en est de même pour le virus de l’hépatite C du fait de l’efficacité des antiviraux qui assurent, à priori, une éradication de l’infection virale. Toutefois en France, l’infection par le cytomégalovirus n'a jamais été une contre-indication à la transplantation d’organe en raison de la séroprévalence élevée de celle-ci (proche de 80 %), et dans le cas de l’infection par le virus HCV, des dérogations permettent le recours à des donneurs et receveurs de transplants « positifs ».

Références

(1) Touzot M, Pillebout E, Matignon M, Tricot L, Viard JP, Rondeau E, et al. Renal transplantation in HIV-infected patients: the Paris experience. Am J Transplant 2010 ; 10 (10) : 2263-9.
(2) Muller E, Barday Z, Mendelson M, Kahn D. HIV-positive-to-HIV-positive kidney transplantation – results at 3 to 5 years. N Engl J Med 2015 ; 372 (7) : 613-20.

* Hôpital Saint-Louis-Université Denis Diderot Paris 7.